Kana Fubuki

Histoire:

Kana est née en automne, dans la chaleur d'une petite maison norvègienne, à l'abri de la tempête de neige qui sévissait au même moment. Le hasard fait bien les choses, puisque son nom de famille ne signifie rien d'autre que tempête de neige, dans sa langue paternelle et maternelle. Ses parents, Akio et Yuki, habitaient depuis plusieurs années déjà dans ce pays glacial lorsque leur première fille naquit, durant la nuit. L'accouchement se déroula sans difficulté particulière, bien qu'il ait eu lieu au domicile des époux Fubuki, qui se situait dans un petit village isolé. Dès sa plus tendre enfance, Kana s'y fit une place, et ne rencontra pas d'obstacle à sa socialisation en s'intégrant très facilement parmi les autres garnements de l'école où elle était inscrite. Tout allait pour le mieux...

Papa, maman, pourquoi souriez-vous tout le temps?

La fillette, alors âgée d'à peine six ans, leva son regard innocent et interrogatif sur ses géniteurs, dont l'étirement des lèvres s'estompa. Akio resta très calme, mais il détourna les yeux de sa fille, comme dégoûté, tandis que Yuki explosait et envoyait les restes du dîner contre le mur et le plancher. Aucun cri ne retentit, aucune larme ne coula. Seul le bruit répétitif des assiettes et des couverts s'écrasant avec force devant l'enfant comblait le silence. Sans mot dire, Kana se leva entre deux fourchettes qui volaient, et disparut dans sa chambre, enfermée à clef. Elle passa la nuit à sangloter, sous le drap gelé et immaculé. À l'aube, Akio et Yuki vinrent la trouver. Ils la menèrent jusqu'à l'aéroport le plus proche, et lui confièrent un billet enfant pour le Japon. Aller simple.

Si Kana ne s'était jusqu'à cet événement jamais posé de questions relatives au bonheur qui envahissait la maisonnée norvègienne, c'était grâce à ses parents. Ils avaient fui leurs familles respectives pour savourer leur amour loin de toute contrainte, mais c'était sans compter avec la routine et les disputes qui allaient crescendo. Pour ne pas perturber l'équilibre de leur enfant qu'ils aimaient plus que tout, ils affichaient une relation d'époux soudés, ce qui n'était au final qu'une belle mascarade.
Kana fut envoyée en pensionnat. Et peu à peu, elle s'habitua au rythme de vie nippon et aux contraintes imposées par les règles de savoir-vivre, qui étaient nombreuses dans ce pays. Sa colocataire, Machi, faisait partie d'une petite bande de délinquants liés aux yakuzas. De fil en aiguille, les deux jeunes filles firent connaissance et finirent par ne plus se quitter. Kana était très influençable, à cette époque, sortant tout juste d'une période pleine de "bonheur" qu'elle venait de perdre sans vraiment comprendre pourquoi. Plus le temps passait, plus elle sentait s'élever au fond de ses entrailles une rancoeur à l'égard de ses parents. Passe rebelle, l'adolescence! Après plusieurs mois passés avec Machi, son amie devint un membre à part entière du petit groupe. Ensemble, elle firent beaucoup de ce qu'on appelle maintenant "conneries". Kana oublia l'école, passant ses journées entre drogue et combats de rue. Il lui restait néanmoins assez de conscience pour ne pas se prostituer.

J'ai peur, maman, j'ai peur!

Un hurlement lugubre s'éleva de la petite maison norvègienne, lorsque Kana en défonça la porte d'un coup de pied bien placé.

Je suis de retour.

Et quel retour! Les époux Fubuki eurent un mal fou à reconnaître leur propre enfant. À présent majeure et libre des chaînes que représentaient ses parents, la jeune fille arborait un air peu commode et des vêtements pour le moins inadaptés au climat du pays glacial où elle avait passé son enfance. Une longue cicatrice courait sur son oeil gauche, résultat d'un lynchage entre deux groupes de yakuzas rivaux. Cigarette entre les lèvres, elle empestait l'alcool. Son regard noir et farouche se posa ses deux petits filles à l'air effrayé.

C'est vrai qu'elles ne connaissent pas leur grande soeur.

Kana gratifia d'une caresse la tête de Megumi et Wakaba, dont les yeux se remplirent subitement d'étoiles. Leur grande soeur était belle, bien qu'effrayante, et elle avait une aura semblable à celle de ces héros tiraillés entre le bien et le mal, le clair et l'obscur, dont on ne savait pas tout à fait s'ils étaient du côté des bons ou du côté des méchants. Les parents de la progéniture exclusivement féminine demandèrent à leur fille aînée de partir, ce qu'elle fit après avoir été reniée. Elle n'était passée que pour récupèrer cette peluche qui trônait fièrement sur sa coiffeuse, et que la poussière avait recouvert comme la neige, au dehors, avait recouvert les ruelles pavées de son petit village natal. Elle offrit au final la peluche à ses soeurs, après l'avoir déchirée en deux. L'ourson était maintenant dans un piteux état, mais qu'importe. Megumi et Wakaba recousurent chacune leur partie, de fait la peluche resta scindée en deux, mais elles leur firent également une marque semblable à celle de leur grande soeur adorée.
Cette dernière arpenta l'Europe, et réussit, on ne sait comment, à se faire admettre dans une école d'art anglaise. Elle se spécialisa dans le théâtre, obtint avec succès son diplôme et commença enfin sa vie d'artiste, sous le pseudonyme de Bara, rose en japonais. Car sur le bandeau qui recouvre son oeil gauche, durant ses représentations, il y a une rose d'un rouge sanglant. Elle fut de ceux qui lirent cet article de journal, et qui s'y reconnurent, car elle est elle aussi touchée par une malédiction. Ni une ni deux, elle embarqua quelques affaires, et prit la direction de l'internat, dans la ferme intention d'être embauchée.

Voilà, j'ai modifié certaines choses, et les réponses à ta question ont aussi été ajoutées dans le premier post, voilà! ^^